La création d’une Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle (SASU) représente un choix stratégique de plus en plus prisé par les entrepreneurs souhaitant allier flexibilité statutaire et protection patrimoniale. Cette forme juridique, dérivée de la SAS mais adaptée à l’associé unique, nécessite le respect de procédures administratives rigoureuses et la constitution d’un dossier complet pour obtenir l’immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés. Entre la rédaction des statuts constitutifs, le dépôt du capital social minimum, la publication d’annonces légales et les multiples formalités auprès du greffe, la déclaration de création d’une SASU exige une préparation méthodique pour éviter tout rejet ou retard dans les démarches.
Statuts constitutifs et capital social minimum pour une SASU
Rédaction des statuts selon l’article L227-1 du code de commerce
La rédaction des statuts constitue la première étape fondamentale dans la création d’une SASU. Conformément à l’article L227-1 du Code de commerce, ces documents contractuels définissent l’architecture juridique de la société et organisent ses modalités de fonctionnement. Les statuts doivent obligatoirement préciser la dénomination sociale, l’objet social, l’adresse du siège social, ainsi que la durée de la société qui ne peut excéder 99 ans.
L’objet social revêt une importance particulière car il délimite le champ d’activité de la SASU et conditionne sa capacité juridique. Une rédaction trop restrictive peut limiter les perspectives d’évolution de l’entreprise, tandis qu’une formulation trop large risque de manquer de précision. Les statuts doivent également détailler les modalités de fonctionnement des assemblées générales, même si l’associé unique prend seul les décisions relevant normalement de la compétence des assemblées.
Fixation du capital social et apports en numéraire ou en nature
Contrairement à d’autres formes sociétaires, la SASU ne impose aucun montant minimum de capital social, permettant théoriquement une constitution avec un euro symbolique. Cependant, cette flexibilité ne doit pas occulter les enjeux pratiques liés au montant du capital. Un capital social trop faible peut nuire à la crédibilité commerciale de la société et compliquer les relations avec les partenaires financiers.
Les apports peuvent prendre différentes formes : apports en numéraire (sommes d’argent), apports en nature (biens mobiliers ou immobiliers) ou apports en industrie (savoir-faire, compétences). Les apports en nature nécessitent l’intervention d’un commissaire aux apports lorsque leur valeur excède 30 000 euros ou représente plus de la moitié du capital social. Ce professionnel évalue les biens apportés et certifie leur valeur dans un rapport annexé aux statuts.
Le choix du montant du capital social doit refléter la réalité économique du projet et inspirer confiance aux tiers.
Nomination du président et définition de ses pouvoirs statutaires
La SASU est obligatoirement dirigée par un président, personne physique ou morale, dont la nomination peut s’effectuer dans les statuts ou par acte séparé. Cette flexibilité permet à l’associé unique de se nommer président ou de désigner un tiers, selon la stratégie envisagée. Les statuts doivent préciser l’étendue des pouvoirs du président, ses modalités de nomination et de révocation, ainsi que la durée de son mandat.
La définition des pouvoirs statutaires revêt une importance cruciale car elle détermine la capacité du président à engager la société vis-à-vis des tiers. Les statuts peuvent limiter ces pouvoirs ou, au contraire, les étendre au-delà du pouvoir légal de représentation. Cette modularité statutaire constitue l’un des principaux avantages de la SASU par rapport à d’autres formes juridiques plus rigides.
Clause d’agrément et modalités de cession d’actions
Bien que la SASU ne compte qu’un associé unique lors de sa création, les statuts doivent anticiper d’éventuelles évolutions vers une structure pluripersonnelle. Les clauses d’agrément permettent de contrôler l’entrée de nouveaux associés en subordonnant la cession d’actions à l’accord préalable de l’organe social compétent.
Ces dispositions statutaires peuvent prévoir des procédures d’agrément différenciées selon la qualité du cessionnaire ou la nature de la cession. Par exemple, les cessions entre membres de la famille peuvent être libres, tandis que les cessions à des tiers nécessitent un agrément. Cette anticipation évite les modifications statutaires ultérieures et facilite l’évolution de la société.
Formulaire M0 et pièces justificatives obligatoires au greffe
Complétion du formulaire cerfa 13959*10 pour personne morale
Le formulaire M0, désormais accessible uniquement via le Guichet Unique des Entreprises géré par l’INPI, constitue la déclaration officielle de création de la SASU. Ce document administratif recueille l’ensemble des informations nécessaires à l’immatriculation : identité de la société, activité exercée, dirigeants, associés et établissements. La complétion de ce formulaire exige une attention particulière car toute erreur ou omission peut entraîner un rejet du dossier.
Depuis la dématérialisation des procédures en janvier 2023, le formulaire M0 s’intègre dans un processus entièrement numérique qui simplifie les démarches tout en exigeant une rigueur accrue dans la préparation des documents. Le formulaire permet également de demander simultanément l’immatriculation au Registre National des Entreprises (RNE) et au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS).
Attestation de dépôt de fonds et justificatifs d’apports
L’attestation de dépôt de fonds, délivrée par l’établissement dépositaire, constitue une pièce maîtresse du dossier d’immatriculation. Cette attestation certifie que les apports en numéraire ont été effectivement versés sur un compte bloqué au nom de la société en formation. Le déblocage des fonds n’intervient qu’après obtention de l’extrait Kbis, garantissant ainsi la réalité du capital déclaré.
Pour les apports en nature, les justificatifs varient selon la nature des biens apportés : factures d’achat, certificats de propriété, rapports d’expertise ou évaluations. Ces documents doivent établir clairement la valeur et la propriété des biens transférés à la société. La traçabilité des apports constitue une exigence fondamentale pour la validation du dossier par le greffe.
Déclaration de non-condamnation du dirigeant social
La déclaration de non-condamnation et de filiation du dirigeant représente une obligation légale destinée à vérifier l’honorabilité des personnes amenées à diriger la société. Cette déclaration sur l’honneur doit être datée et signée par le dirigeant, attestant qu’il n’a fait l’objet d’aucune condamnation ou mesure d’interdiction de gérer ou d’administrer une entreprise.
Cette formalité s’accompagne de la fourniture d’une pièce d’identité en cours de validité et, le cas échéant, d’un titre de séjour pour les dirigeants de nationalité étrangère. Les autorités peuvent procéder à des vérifications a posteriori, rendant toute fausse déclaration passible de sanctions pénales. L’exactitude de ces informations conditionne donc la validité de l’immatriculation.
Justificatif de domiciliation et contrat de domiciliation commerciale
Le siège social de la SASU doit faire l’objet d’une justification précise auprès du greffe, qui exige la production de documents probants selon la nature de la domiciliation choisie. En cas de domiciliation au domicile du dirigeant, une attestation sur l’honneur accompagnée d’un justificatif de domicile récent suffit, sous réserve du respect des règles d’urbanisme et de copropriété.
Pour une domiciliation en société spécialisée, le contrat de domiciliation doit être conforme aux dispositions légales et souscrire les garanties requises. Cette option présente l’avantage de fournir une adresse commerciale prestigieuse sans les contraintes d’un bail commercial. La domiciliation en pépinière d’entreprises ou en espace de coworking nécessite quant à elle la production du contrat d’hébergement et des autorisations administratives correspondantes.
Procédure d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés
L’immatriculation au RCS constitue l’aboutissement du processus de création et confère à la SASU sa personnalité juridique. Cette procédure s’effectue désormais exclusivement via le Guichet Unique des Entreprises, qui centralise l’ensemble des formalités et assure la transmission aux différents organismes compétents. Le greffe du tribunal de commerce vérifie la conformité du dossier avant de procéder à l’inscription définitive.
La procédure d’immatriculation génère automatiquement l’attribution d’un numéro SIREN par l’INSEE et l’inscription au Répertoire National des Entreprises. Ces identifiants uniques permettent à la société d’être référencée dans l’ensemble des bases de données administratives et commerciales. L’obtention de l’extrait Kbis marque officiellement la naissance juridique de la SASU et l’autorise à commencer ses activités commerciales.
Le délai moyen d’immatriculation varie généralement entre 1 et 15 jours ouvrables, selon la complétude du dossier et la charge de travail du greffe compétent. Tout dossier incomplet fait l’objet d’une demande de régularisation qui suspend la procédure jusqu’à production des pièces manquantes. Cette vigilance procédurale explique l’importance d’une préparation soigneuse du dossier initial pour éviter les retards préjudiciables au lancement de l’activité.
La qualité du dossier d’immatriculation conditionne directement la rapidité d’obtention de la personnalité juridique.
Publication d’annonce légale dans un journal d’annonces légales
Contenu obligatoire selon l’article R210-3 du code de commerce
La publication d’une annonce légale dans un Support Habilité à recevoir des Annonces Légales (SHAL) constitue une formalité de publicité obligatoire régie par l’article R210-3 du Code de commerce. Cette publication vise à informer les tiers de la constitution de la nouvelle société et doit respecter un contenu précisément défini par la réglementation.
L’annonce légale doit mentionner la dénomination sociale, la forme juridique, le montant du capital social, l’adresse du siège social, l’objet social, la durée de la société, l’identité du dirigeant et le greffe d’immatriculation. Toute omission ou erreur dans ces mentions obligatoires peut entraîner l’invalidité de la publication et nécessiter une nouvelle parution aux frais de la société.
Tarification départementale et choix du journal habilité
La tarification des annonces légales obéit à un barème départemental fixé annuellement par arrêté préfectoral, garantissant une uniformité des coûts sur le territoire. Pour 2024, le tarif forfaitaire s’élève généralement à 138 euros hors taxes pour une SASU, montant identique dans la plupart des départements français. Cette harmonisation tarifaire simplifie la budgétisation des frais de création.
Le choix du journal habilité s’effectue parmi la liste officielle des SHAL du département du siège social, consultable en préfecture ou sur les sites institutionnels. Certains journaux proposent des services en ligne facilitant la rédaction et la publication de l’annonce, avec parfois des délais de parution plus courts. La dématérialisation de ces services accélère considérablement les démarches tout en conservant la valeur juridique de la publication.
Attestation de parution et numéro d’annonce légale
L’attestation de parution, délivrée par le journal après publication, constitue une pièce indispensable du dossier d’immatriculation. Ce document certifie la réalisation effective de la formalité de publicité et mentionne les références de la publication : numéro d’annonce, date de parution, nom du journal. Ces informations permettent au greffe de vérifier la conformité de la publication.
Le numéro d’annonce légale, attribué automatiquement lors de la publication, facilite le référencement et la traçabilité de l’avis. Cette numérotation séquentielle permet également aux tiers intéressés de retrouver facilement l’annonce dans les archives du journal. L’évolution vers la publication numérique maintient ces exigences de traçabilité tout en améliorant l’accessibilité de l’information.
Coûts de création et délais d’obtention du kbis
Le coût global de création d’une SASU se décompose en plusieurs postes obligatoires et facultatifs, permettant d’évaluer précisément l’investissement initial nécessaire. Les frais obligatoires comprennent les émoluments du greffe (39,42 euros), les frais de publication de l’annonce légale (138 euros en moyenne) et les frais de déclaration des bénéficiaires effectifs (21,41 euros), soit un total minimal d’environ 200 euros.
Les coûts facultatifs peuvent considérablement augmenter ce montant selon les choix opérés : rédaction des statuts par un professionnel (300 à 1500 euros), domiciliation commerciale (200 à 800 euros annuels), ouverture de compte bancaire professionnel (gratuit à 300 euros selon l’établissement) et éventuellement intervention d’un commissaire aux apports (800 à 2000 euros). Une budgétisation réaliste doit intégrer ces variables pour éviter les surprises financières.
Le délai d’obtention de l’extrait Kbis varie généralement entre 1 et 15 jours ouvrables à compter du dépôt
d’un dossier complet. Cette variabilité s’explique par les différences de charge entre les greffes et la complexité des vérifications requises. Un dossier incomplet ou présentant des irrégularités peut prolonger ce délai de plusieurs semaines, justifiant l’importance d’une préparation rigoureuse en amont.
La dématérialisation des procédures via le Guichet Unique a considérablement accéléré les délais moyens tout en renforçant la traçabilité des dossiers. Les entrepreneurs peuvent suivre en temps réel l’avancement de leur demande et recevoir des notifications automatiques en cas de demande de complément. Cette modernisation administrative améliore l’expérience utilisateur tout en maintenant la sécurité juridique des formalités.
Un dossier parfaitement constitué permet d’obtenir l’extrait Kbis en moins d’une semaine dans 80% des cas.
Obligations post-immatriculation et formalités complémentaires
L’obtention de l’extrait Kbis ne marque pas la fin des obligations administratives mais ouvre une nouvelle phase de conformité réglementaire. La SASU nouvellement immatriculée doit accomplir plusieurs formalités complémentaires dans les mois suivant sa création pour respecter l’ensemble de ses obligations légales et fiscales.
La déclaration des bénéficiaires effectifs auprès du Registre des Bénéficiaires Effectifs (RBE) constitue une obligation majeure à accomplir simultanément ou immédiatement après l’immatriculation. Cette déclaration, sanctionnée pénalement en cas d’omission, vise à identifier les personnes physiques détenant directement ou indirectement plus de 25% du capital ou des droits de vote, ou exerçant un contrôle sur la société.
L’ouverture d’un compte bancaire professionnel devient rapidement indispensable pour débloquer les fonds déposés lors de la constitution et gérer les flux financiers de la société. Cette démarche, bien que non obligatoire juridiquement après l’immatriculation, s’impose dans la pratique pour séparer les patrimoines et faciliter la comptabilité. Le choix de l’établissement bancaire influence les coûts de fonctionnement et les services disponibles pour l’entreprise naissante.
Les obligations comptables et fiscales débutent dès le premier jour d’activité de la SASU, nécessitant la mise en place d’une organisation appropriée. La tenue d’une comptabilité régulière, l’établissement de comptes annuels et le dépôt des déclarations fiscales périodiques constituent des impératifs légaux dont le non-respect expose à des sanctions. La structuration comptable initiale conditionne la qualité du pilotage financier et la conformité réglementaire future de l’entreprise.
Enfin, l’assujettissement à la TVA peut nécessiter des démarches spécifiques selon le régime choisi et le chiffre d’affaires prévisionnel. La demande de numéro de TVA intracommunautaire, l’option pour un régime particulier ou la mise en place des obligations déclaratives requièrent une attention particulière pour éviter tout contentieux fiscal. Ces formalités post-création complètent le dispositif réglementaire et garantissent le fonctionnement conforme de la SASU dans son environnement juridique et économique.